Le ciel ne sait pas encore ce qu'il va faire. Il laisse les nuages s'amuser mais le soleil est encore bien présent. Il fait juste bon, pas de vent, rien qu'une légère brise qui traverse l'appartement et nous chatouille gentiment les poils de gambette. Je rentre de la déchetterie où j'ai largué les piles et un cadavre de cafetière et je découvre la maison vide. Mais rapidement ma femme me téléphone pour que je mette en carafe du vin. Elle rentre de chez Puig, célèbre fromager du centre ville montpellierain.
On a donc déjeuné comme des salopards.
J'avais promis au nain de lui faire des pâtes. Il a eu droit à ses penes au ketchup. Pendant ce temps, j'ai commencé par étaler de la tomme de brebis sur un pain made in notre boulangerie d'en bas, place Carnot, que je recommande pour les hédonistes de la bouche. Ce pain est un multi-céréales, tendre et garni de raisins secs. Ce duo pain-fromage est en soi un festival pour les papilles, mais quand le St Chinian, un château des Albières, entre dans la danse, je jouis. Je n'étais pas au bout de mes surprises. Est venu ensuite le clou du spectacle : un Beaufort au goût incroyable. Moi j'y ai tout de suite vu du poulet rôti, jus de volaille, quelque chose de braisé et sensuel à la fois, ma femme y a plutôt vu du bois ou du fumé. Allez comprendre. Quoiqu'il en soit, c'est un petit avant goût du paradis. C'est la justification des heures de boulot, du stress de la semaine. Un camembert, Médaille d'or 2009, coulant à souhait, vieilli comme il faut, avec toutes les senteurs et les tâches brunes sur la croûte moelleuse. En petite pause, un pélardon extra. Ni sec, ni trop tendre, suffisamment pour l'étaler sans difficulté. Pas piquant, goûteux. Et jolie conclusion, un Roquefort où (pourquoi? comment? je deviens fou!) j'ai trouvé un goût de lait de vache! Sans doute que je confonds, du cuir, de l'écurie sans doute. En tout cas, très subtil. Magnifique.
Pendant ce temps, à la télévision, on s'est mis une partie de poker, un WPT de 2005 si mes souvenirs sont bons, où un Gus Hansen a gouverné avec magie la table. Phil Laak, Esfandiari ou bien encore Devil Fish se sont inclinés avec humilité et même une bonne humeur qui faisait écho à notre table. On a ri, on a bien mangé, bien bu.
Ce qui est somptueux dans les plaisirs de bouche, c'est qu'ils se prolongent jusque dans la digestion. Pendant que ma femme et le petit se prélassaient devant L'age de glace 3, je me laissais bercer par Morphée une vingtaine de minutes, le temps de respirer avec joie les échanges gastriques qui pétillaient jusque dans ma gorge.
Vive le fromage, vive le vin, vive le déjeuner, vivent les petits bonheurs simples, vivent ma femme et le petit blondinet de 6 ans ("et demi")!
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